500 générations ! L’étonnante mémoire/transmission des Aborigènes.
Le 27 juillet, 17h, conférence/visite commentée : "Les Aborigènes et leur peinture" à Ste Foy les Lyon. Gratuit, réservation par SMS au 0679362050
On pourrait penser que la transmission orale qui est celle des peuples sans écriture se limite à quelques générations, et pourquoi pas, quelques siècles, ce qui est déjà très bien quand on pense que, dans notre propre société, tout le monde ne connaît pas le métier de son arrière-grand-père !
Les Aborigènes, eux, prétendent le contraire. Leur « mémoire », disent-ils, remonte aux origines de l’humanité et même de la terre. D’ailleurs, le Temps du Rêve, leur grand réservoir mythique des origines, peuplé d’entités énergétiques mutantes qui prennent des formes animales, végétales, humaines, ne raconte t-il pas une histoire « darwinienne » ? Leurs usages, coutumes, pratiques magiques et/ou guérisseuses, sont ceux enseignés par leur très lointains ancêtres. Leurs rituels, chants, danses et signes peints évoquent la dernière glaciation il y a plus de 11000 ans, les terres anciennement émergées, et même la chute d’une météorite il y a 145 millions d’années, pour ne parler que de quelques exemples que la science peut confirmer.
La science, notre religion à nous, vient de leur donner raison une fois de plus : Dans le sud de l’Australie, des archéologues ont trouvé les preuves d’une cérémonie de magie/ guérison vieille de 12000 ans et qui se pratiquait encore lorsque la colonisation est venue percuter les sociétés aborigènes. C’est-à-dire qu’elle aurait traversé 500 générations. On ne connait pas, en archéologie, d’autres exemples du maintien d’une pratique aussi longue.
De quelle mémoire s’agit-il ? connaissance innée, archétypale ? mémoire biologique ? transmission de génération en génération ?
Interaction et contrôle de la narration ?
La fiabilité de cette transmission pourrait pour partie résider dans l’interaction entre l’exécutant d’un rituel, chant, danse etc… et son « Policeman ». Je m’explique : La responsabilité spirituelle d’un territoire fait de la personne, homme ou femme, un kirda (gardien) par la lignée paternelle. Dans le même temps, de par la lignée maternelle la personne est également Kurdungurlu (policeman) d’un autre territoire. De ce fait chaque site, itinéraire, histoire, territoire est célébré par deux personne. Les rituels sont exécutés par le gardien/kirda et contrôlé par le policeman/kurdungurlu. Celui-ci est intraitable sur la bonne exécution des pratiques, danses et motifs, et sur la fidélité du chant. Kirda et Kurdungurlu interagissent étroitement à travers ces rôles complémentaires. Cette dualité est sans doute l’une des raisons d’un transmission fidèle sur une longue période.
Cela ne vous convainc pas totalement, surtout sur plusieurs dizaines de millénaires ?
Connaissance innée ? Mémoire biologique ? Dialogue avec la nature ?
L’hypothèse audacieuse de l’anthropologue Jeremy Narby (Le serpent cosmique, l'ADN et les origines du savoir) tente de jeter un pont entre science et chamanisme. Pour lui une connaissance de l'intime du vivant serait innée, quasiment biologique, les peuples premiers possédant encore ce savoir que les occidentaux redécouvrent par leurs instruments. Son étude s’attache surtout aux peuples qui usent de l’ayahuasca en Amazonie mais ses conclusions s’étendent à tous les peuples qui ont la représentation du serpent, double ou simple, ou de lignes entrelacées comme vision de l’ADN et de l’origine de la vie et du savoir. Et il semble en trouver sur tous les continents !
Ainsi devant cette photo d’une peinture du Serpent d'Arc-en-ciel réalisée sur une paroi rocheuse par la tribu aborigène Walpiri, il écrit : « Je regardai l'image de près et vis deux choses: des espèces de chromosomes, en forme de «U» renversé, tout autour du serpent, et en-dessous, une sorte d'échelle double ! Je me suis littéralement frotté les yeux, me disant que j'imaginais des connexions.
Mais il n'y avait rien à faire. Ni l'échelle double, ni les chromosomes ne voulaient ressembler à autre chose. J’allais apprendre, quelques semaines plus tard, que les chromosomes ayant cette forme sont en «anaphase», une des étapes du dédoublement cellulaire, c'est-à-dire du mécanisme central de la reproduction de la vie, et que la première image des serpents en zigzag ressemblait à s'y méprendre à des chromosomes en état de «première prophase».
Les serpents sont nombreux dans les représentations aborigènes. Ils vont souvent par deux dans les mythes, ils sont à l’origine de l’eau et de la vie. Parfois ce sont deux lignes sinueuses qui s’entrecroisent formant une double hélice et les peintres disent être les lignes de danse. Ces entrelacs donnent naissance, pour les Warlpiri, à la première forme de vie, une liane, justement dénommée Ngalypi ou « Petit serpent ». A un niveau profane de lecture, il s’agit, selon les peintres, ici Judy Watson Napangardi et, à sa suite sa fille Susie Watson Nangala, des lignes de danse des deux géantes ancestrales chantant et dansant l’eau, puis la vie. Ces deux personnages mythiques sont représentés sous forme de U accolés ou non aux cercles à fond colorés qui représentent les lacs (personnages vus d’en haut de l’iconographie du désert), dont J. Narby dit qu’il pourrait s’agir d'une vision/rêve des « chromatides ».
Bien sûr, cette hypothèse a beaucoup de détracteurs, et des rationalistes pur jus ont des mots très durs envers ce qu'ils appellent « imposture anthropologique » et « errances métaphysiques ». Mais pourquoi s’interdire de rêver à une transcendance qui est peut-être à la source de cette étonnante mémoire/transmission ? Pourquoi s'empêcher de voir dans les peintures magistrales des Aborigènes bien autre chose que des histoires de danse ou de serpents se promenant dans le désert ?
Le 27 juillet, 17h, conférence/visite commentée : "Les Aborigènes et leur peinture" à Ste Foy les Lyon. Gratuit, réservation par SMS au 0679362050